Football-the-story

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L'affaire OM-VA

L'affaire OM-VA

 

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Reine des affaires de corruption, scandale indépassable qui a plongé l’OM en D2 et mis à nu le système Bernard Tapie, l’affaire OM-VA est somme toute assez banale, celle d’un achat de joueur, la veille d’un match important, pour lever le pied comme on dit… par sa dimension médiatique incroyable ainsi que les implications politique, dans un contexte, compliqué, retour sur l’histoire symbole de l’OM.

 

Un match banal
 
Nous sommes le 20 mai 1993, pour le compte de la 36ème journée, l’OM se déplace sur la pelouse du promu Valenciennes. En championnat, l’OM, leader a des grandes échéances à venir, tout d’abord la finale de la Ligue des champions, contre le Milan AC, puis la réception du Paris SG qui sera décisive pour le titre. Autant dire que ce déplacement n’a rien de vraiment capital. Pour les nordistes, à la lutte pour le maintien, un nul serait une bonne affaire.
 
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L’OM s’impose logiquement 1 à 0, grâce à un but d’Alen Boksic, mais à la mi-temps, les dirigeants valenciennois ont déposé une réserve technique , accusant les marseillais de tentative de corruption. C'est Jacques Glassmann qui révèle le scandale en plein match. Jean Marie Véniel était l'arbitre du match. Il est originaire de Saint Omer. Il se souvient très bien du moment où Jacques Glassmann est venu lui dire que le match était truqué. Mais selon lui, Valenciennes n'est pas totalement clair dans cette affaire. À la fin du match, le doute s’installe lorsqu'il confirme les accusations le lendemain du match… Il nomme même expressément Jean-Jacques Eydelie, milieu de l’OM. Étant donné le contexte, l’affaire fait peu de bruits, tout le monde se focalise sur la finale de la Ligue des champions, un petit sujet sur FR3 semble suffire...
 
La fiche de match
 
Valenciennes 0-1 OM
Alen Boksic (21ème) pour Marseille
Le 20 mai 1993 au Stade Nungesser
Arbitre: Jean-Marie Véniel
 
Valenciennes FC Marseille
Michel Pageaud Fabien Barthez
Philippe Gaillot Eric Di Méco
Jacques Glassmann Marcel Desailly
David Régis Franck Sauzée
Jérôme Foulon Jocelyn Angloma
Arnaud Duncker Jean-Christophe Thomas
Thierry Fernier ↓ Didier Deschamps
Laurent Dufresne ↑ (80ème) Jean-Jacques Eydelie
Stéphane Grosselin Abédi Pelé ↓
Jorge Burruchaga Jean-Philippe Durand ↑(46ème)
Christophe Robert ↓ Alen Boksic
Kalman Kovacs ↑ (24ème) Rudi Völler ↓
Wilfried Gohel Jean-Marc Ferreri ↑ (89ème)
ent: Boro Primorac ent: Raymond Goethals

L’OM remporte la finale de la Ligue des Champions contre le Milan, puis 3 jours plus tard domine le PSG 3 buts à 1 dans un stade Vélodrome en éruption… Tout le monde se félicite…
 
L’affaire éclate
 
L'imbroglio Jacques Mellick
 
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Une fois la folie retombée, l’affaire va se lancer au début de l’été. Une véritable saga qui va tenir en haleine tout le pays avec une cascade de personnages hauts en couleurs. Valenciennes est descendue en D2 et n’a plus rien à perdre. Boro Primorac, l’entraîneur, relance l’histoire et explique au juge d’instruction Eric De Montgolfier que Bernard Tapie, lui a demandé une semaine auparavant (nous sommes le 23 juin) d’endosser la responsabilité de la tentative de corruption. Acculé, Tapie sort l’alibi Jacques Mellick, soi-disant présent dans son bureau à l’heure indiquée par le technicien yougoslave. Or une demi-heure plus tard, Mellick est pris en photo à Béthune, à l'occasion d'une réunion publique… C’est le fameux Paris-Béthune en 30 minutes… Manifestement, il y a baleine sous gravillon… L'étau se resserre.
 
Le procureur Éric de Montgolfier accélère
 
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Tapie va alors tout tenter pour impressionner Eric de Montgolfier, le magistrat en charge de l’affaire, en insistant sur la complexité et la dureté du milieu. Selon lui, Bernès "pouvait, tout au plus, faire des promesses, mais certainement pas les tenir". Quant à Glassman, il n’est qu’un "joueur sans avenir, commandité par d’autres. Et qui a dû disjoncter pour que son club ne descende pas en division 2, où il ne vaudrait plus rien". L’entrevue entre les deux hommes finira en totale queue de poisson, Tapie ne parvenant pas à ses fins. Le 10 février, il est mis en examen pour complicité de corruption et tentative de subornation de témoin. Un mois plus tard, il est balancé par Bernès comme étant responsable de l’ordre de payer les valenciennois.
 
Une enveloppe de 250 000 Frs
 
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Le 24 juin, le lendemain donc de la déclaration de Primorac, une enveloppe contenant environ 250 000 francs est déterrée dans le jardin de la tante de Christophe Robert, joueur de Valenciennes, qui habite Périgueux. Mis en examen, Christophe Robert craque et balance toute l’histoire. La découverte accrédite la version de Jacques Glassmann sur laquelle vont s'aligner progressivement les autres témoins. La veille du match, Jean-Jacques Eydelie et Jean-Pierre Bernes ont contacté 3 valenciennois, Glassmann, Robert et Burruchaga. Tout ce petit monde se connaissait bien puisque passé par Nantes dans les années 80, sauf Glassmann, qu’Eydelie avait croisé lors de son passage à Tours (saison 1987-88)… Les masques tombent…
 
Les casseroles belgo-marseillaises
 
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Si l’affaire s’emballe, c’est qu’il y a un certain passif côté marseillais. Tapie a de nombreux admirateurs, mais aussi beaucoup d’ennemis, dans le football et en politique. La réussite marseillaise, construite sur l’éviction de Claude Bez à Bordeaux, est émaillée de quelques casseroles : tentatives de corruption diverses, jus d’orange frelaté servi à Rennes ou au CSKA Moscou, intimidation, dopage tout y passe en l’espace de 4 ans. Mais surtout, c’est l’entraîneur marseillais, Raymond Goethals qui a trempé dans une affaire similaire, à l’époque où il entraînait le Standard de Liège en 1982. Eric Gerets était alors dans le rôle d’Eydelie. Le Standard a acheté le dernier match de la saison contre Watershei en vue de l’obtention du titre et d'être frais avant la finale (perdue) de la Coupe d'Europe des vainqueurs de coupe face au FC Barcelone .
 
Sanctions sportives
 
Face à ce qui semble être une évidence, la Fédération française de Foot et l’UEFA ne peuvent que réagir et n’attendent pas un hypothétique procès. Le 6 septembre, l’OM est exclu de la Ligue des champions, privé de Supercoupe d’Europe et de Coupe Intercontinentale. Le 22 septembre, l’OM est officiellement destitué de son titre de champion de France 1993 (gracieusement refusé par le PSG), les joueurs incriminés sont suspendus, de même que Bernes et Tapie. Le 22 avril 1994, l’OM est rétrogradé en D2. Il paraît que le club était condamné à descendre dans la division de son classement finale (minimum en D2), mais qu’en cas de 3ème place, l’OM aurait été rétrogradé en National.
 
Un procès surmédiatisé
 
Un premier procès à lieu en mars 1995. Face à l’évidence, Tapie oriente sa défense sur le fait de vouloir éviter les blessés (ce qui est vraisemblable). Se rappelant du match entre St Etienne et Nîmes quelques jours avant la finale de 1976 qui avait coûté 2 joueurs aux verts avant d’affronter le Bayern, il a voulu éviter que pareille situation ne se reproduise.
Le détail des condamnations en première instance est le suivant :
 
Bernard Tapie est condamné à deux ans d’emprisonnement, dont un ferme ;
Jean-Pierre Bernès à deux ans avec sursis et 15 000 francs d’amende (environ 2 300 euros) ;
Jean-Jacques Eydelie à un an avec sursis et 10 000 francs d’amende (environ 1 500 euros) ;
Christophe Robert et Jorge Burruchaga à six mois avec sursis et 5 000 francs d’amende chacun (environ 750 euros) ;
Marie-Christine Robert à trois mois avec sursis;
Jacques Glassmann qui a révélé l'affaire, obtient un franc de dommages et intérêts pour préjudice moral.
Bernard Tapie fait appel et sa peine sera ramenée à 2 ans de prison dont 16 mois avec sursis au lieu de 12. La justice estime que la motivation des Marseillais était essentiellement basée sur le désir de ne pas perdre de joueur sur blessure, et que Bernard Tapie n'en était pas l'acteur principal. Il a été condamné sans preuve matérielle mais sur intime conviction des juges.
 
La dimension politique de l’affaire est énorme. En effet, on est en 1993 et la gauche, alors au pouvoir vient de prendre une raclée au législative (la droite jouit d’une majorité des 4/5). Bernard Tapie est alors à son apogée et ambitionne la Mairie de Marseille où Le Pen souhaite également se présenter. Mais surtout, la présidentielle de 1995 est dans toutes les têtes, avec la fin de règne de Mitterrand, dont Tapie était proche (il a été Ministre de la ville). Aux yeux de certain, Nanard a probablement des chances d’être un potentiel candidat à la présidence. Il gène et n’est pas accepté par le monde politique… Au-delà des fantasmes de complots, il est évident que cette affaire a servi à le faire tomber. D’une part cette histoire a été plus médiatisée que la Guerre du Golfe et a mobilisé autant de ressources policières que l’affaire du Petit Gregory… Tout ça pour un match de foot. L'ancien procureur de l'affaire, Éric de Montgolfier, déclare "Si le Président de l'OM n'avait pas été Bernard Tapie, il ne serait jamais allé en prison. Les faits ne le méritaient pas".
 
Epilogue
 
Après cet ouragan, les différents protagonistes auront beaucoup de mal à s’en remettre.
 
Les clubs
 
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L’OM, rétrogradé en D2 devra déposer le bilan avant d’être racheté par Robert-Louis Dreyfus en faisant partie du package avec Adidas.

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Pour Valenciennes, ce sera encore pire. La saison 1993-94 sera un calvaire et VA descendra en D3 puis déposera le bilan également. Le club devra attendre 2006 pour retrouver l’élite.
 
Les joueurs
 
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Jean-Jacques Eydelie deviendra le pestiféré du foot français. Après un exil en Argentine, il passera par Bastia avant de finir dans le fossé du foot français. Aujourd’hui encore, il est l’homme par qui le scandale est arrivé et a sorti un lire thérapie "Je ne joue plus".

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Jacques Glassmann, conspué sur tous les terrains et renié par VA, finira sa carrière dans les divisions inférieures, entre la France et la Réunion. Réhabilité par la Ligue, il est au comité de visionnage…
 
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Christophe Robert a également fuit en Argentine à Ferro Carril Oeste, avant de revenir à Louhans-Cuisseaux.
 
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Jorge Burruchaga a perdu sa réputation. Il est rentré en Argentine, à Independiente avant de devenir entraîneur…
 
Le foot français
 
Deux ans plus tard, avec l’arrêt Bosman, la France s’est retrouvée sans véritable locomotive de niveau européen. Le PSG avait amorcé son déclin et l’OM était en pleine reconstruction… peut-être que si l’affaire n’avait pas eu lieu à ce moment-là, la face du championnat de France en aurait été changée à tout jamais, avec un pôle d’attraction des joueurs étrangers.


21/11/2017
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